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La loi sur les secrets d’affaires du 30 juillet 2018

1 août 2019

Dans le domaine de la propriété intellectuelle, le secret des affaires, dont la protection n’est pas assurée par la délivrance d’un titre de propriété par un office, a longtemps été le parent pauvre du patrimoine immatériel des entreprises. En droit français en particulier, la protection de la confidentialité existait dans une certaine mesure, mais était divisée entre de nombreuses notions différentes, selon les domaines du droit (droit administratif, droit de la concurrence, secret de fabriques, etc).

Cette situation était d’autant plus dommageable que, comme le note l’Union Européenne «les évolutions récentes, telles que la mondialisation, le recours croissant à la sous-traitance, l’allongement des chaînes de distribution et l’usage accru des technologies de l’information et de la communication, contribuent à la hausse des risques liés à ces pratiques » visant à l’appropriation illicite de secrets d’affaires.

C’est dans ce contexte qu’à la suite de plusieurs années de négociation, l’Union européenne a finalement abouti à l’élaboration de la directive UE 2016/943 du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites.

Pour plus d’information, concernant l’adoption de cette directive, vous pouvez consulter nos communications de mai et juin 2016.
Cette directive a été transposée en droit français par la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires, suivie du décret d’application n° 2018-1126 du 11 décembre 2018.

La directive et la loi innovent en ce qu’elles créent une notion unifiée du secret des affaires (i), améliorent sensiblement les mécanismes judiciaires visant à le protéger (ii) tout en aménageant sa divulgation en cas de procès (iii).

 I. LA DÉFINITION DU SECRET DES AFFAIRES

Selon la loi, est protégée au titre du secret des affaires, toute information répondant aux critères suivants (article L.151-1 du Code de commerce) :

• Elle n’est pas généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;

• Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;

• Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.

Une information secrète

Conformément à la directive, la loi est très large concernant le type d’informations susceptibles de relever de la protection : ces dernières doivent en premier lieu être confidentielles. A titre d’exemple non exhaustif, il peut s’agir d’informations techniques (tel que le savoir-faire, une demande de brevet non publiée), mais aussi de toute information commerciale, financière, etc. De la même façon, le support de l’information n’a pas d’incidence.

De telles informations peuvent également relever de droits ou titres de propriété intellectuelle(lorsque ces derniers ne font pas l’objet d’une publication : droits d’auteur, dessins et modèles non enregistrés, brevet mis au secret pour raison de défense nationale, par exemple), auquel cas la protection juridique offerte par ces derniers peut se cumuler avec les dispositions spécifiques aux secrets d’affaires, avec des visées différentes : d’une part la réservation d’un droit avec exercice d’un monopole d’exploitation, d’autre part la sanction de pratiques commerciales déloyales.

Une valeur commerciale effective ou potentielle

Si tous types d’informations entrent dans le champ de la loi, encore faut-il que leur détenteur légitime puisse justifier, du fait même de la confidentialité des informations, de leur valeur commerciale. Celle-ci est évaluée notamment au regard du caractère dommageable que leur soustraction, leur usage ou leur divulgation est susceptible de causer à leur détenteur légitime, notamment en termes de compétitivité, d’intérêts stratégiques, financiers et commerciaux.

Toute information conférant ou susceptible de conférer un avantage concurrentiel à son détenteur légitime entre dans cette définition et peut relever du domaine technique et technico-commercial, économique et financier ou encore stratégique et organisationnel de l’entreprise.

Citons à titre d’exemple les méthodes de vente, les profils de consommateurs, les listes de fournisseurs, les fichiers clients, les processus de fabrication, les évaluations de produits, etc.

Des mesures de protection raisonnables émanant du détenteur légitime

Enfin, le troisième critère légal impose la mise en place de mesures de protection « raisonnables compte tenu des circonstances », pour le maintien de la confidentialité des informations supposées relever du secret des affaires.

Si l’emploi du terme « raisonnable » n’est pas défini légalement, les premiers commentaires faits sur la loi considèrent que les entreprises pourront prévoir différents niveaux de protection des informations couvertes par un secret d’affaires en fonction de la nature de l’information elle-même, de son caractère plus ou moins stratégique pour l’entreprise, mais également de la taille et des moyens cette dernière ainsi que des risques plus ou moins élevés d’appropriation de l’information.

Enfin la loi protège le ou les détenteur(s) légitime(s) de l’information : il peut s’agir notamment, selon les rapports contractuels, de plusieurs sociétés au sein d’un groupe, d’un chercheur et de son institution, d’un partenaire commercial, d’un donneur de licence et de ses licenciés, etc.

Recommandations

L’entreprise doit adopter une démarche active. La première chose à faire pour faciliter l’identification des informations confidentielles est de l’indiquer explicitement sur tout document pertinent. Cela peut par exemple être fait en apposant un tampon numérique indiquant « Secret » ou « Confidentiel » sur les documents numériques, en s’assurant que ce tampon ne puisse pas être supprimé (à l’aide de fonctions logicielles restreignant la modification, comme la fonction « Protection » pour les documents pdf). Pour les documents sous format
papier, il est indispensable de se procurer un tampon à encre avec les mêmes mentions.

Il est en outre nécessaire de prévoir des mécanismes pour limiter l’accès à ces documents à un certain nombre de personnes, qui doivent être identifiées. Pour les documents numériques, il convient au minimum de les placer sur un répertoire protégé par un mot de passe, ce mot de passe ne devant être partagé qu’aux personnes disposant des droits d’accès. Les documents en format papier doivent être placés sous clé, la clé ne devant de la même façon qu’être accessible aux personnes identifiées.

Pour limiter les risques, il est utile de sécuriser le système informatique de l’entreprise contre les risques de piratage informatique, dans la mesure où la loi ne définit pas ce qui constitue une mesure de protection « raisonnable ».

Dans le cas d’informations particulièrement sensibles, le recours à l’anonymisation, aux noms de code ou au cryptage d’informations est particulièrement recommandé.
En ce qui concerne l’usage interne des informations confidentielles, il est impératif de prévoir explicitement une obligation de confidentialité dans tous les contrats de travail des employés y ayant accès, au besoin à l’aide d’un avenant.

Si des informations confidentielles sont transmises à des tiers à l’entreprise (dans le cadre d’un échange commercial par exemple, mais aussi de sous-traitance, etc), il est indispensable que cette transmission fasse l’objet d’un contrat en bonne et due forme, comprenant une clause de confidentialité. La signature de simples bons de commande ne permet pas d’assurer une protection adéquate.

Si l’on souhaite éviter l’ingénierie inverse d’un produit par son partenaire commercial, il convient d’en prévoir l’interdiction expresse par une clause contractuelle, sans quoi cela est autorisé par l’article L. 151-3 du Code de commerce.

En cas de litige, il appartiendra à la partie qui se prévaut d’un secret d’affaires de démontrer que les trois conditions cumulatives de l’article L. 151-1 du Code de commerce sont réunies. Par conséquent, il est judicieux de procéder au dépôt d’une enveloppe Soleau (qui peut être électronique) pour se ménager la preuve de la détention de l’information ; dans tous les cas, il convient de conserver une trace de toutes les mesures de protection prises pour pouvoir en justifier à un Tribunal.

II. LES MÉCANISMES JUDICIAIRES VISANT À FAIRE RESPECTER LES SECRETS

L’article L. 151-3 du Code de commerce définit ce qui constitue l’obtention licite d’un secret, à savoir :

– La découverte ou la création indépendante,
– Le reverse engineering, sous réserve que le produit ou l’objet ait été mis à la disposition du public ou qu’il soit de façon licite en la possession de la personne détenant l’information, sauf stipulation contractuelle contraire.

A l’inverse, l’article L. 151-4 du même code enseigne que l’obtention est illicite lorsqu’elle est réalisée sans le consentement de son détenteur légitime (c’est-à dire celui qui en a le contrôle de façon licite), et qu’elle résulte :

• D’un accès non autorisé à tout document, objet, matériau, substance ou fichier numérique qui comprend le secret ou dont il peut être déduit,
• Ou de tout autre comportement considéré, compte tenu des circonstances, comme déloyal et contraire aux usages en matière commerciale.

Par ailleurs, l’utilisation ou la divulgation d’un secret obtenu de façon illicite sont aussi illicites.

La loi ne s’arrête pas là puisqu’aux termes de l’article L. 151-5 alinéa 2, la production, offre, mise sur le marché, importation, exportation ou stockage à ces fins de « tout produit résultant de manière significative d’une atteinte au secret des affaires » est considéré comme illicite, si la personne qui exerce ces activités savait ou aurait dû savoir que le secret était utilisé de façon illicite.

Enfin, l’article L. 151-6 prévoit que l’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret est illicite lorsque la personne savait ou aurait dû savoir que le secret avait été obtenu, directement ou indirectement, d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite.

L’utilisation du secret d’affaires par un tiers indélicat n’est donc pas le seul acte que la loi cherche à réprimer, puisqu’elle permet aussi d’incriminer l’usage qu’en feront les tiers successifs ainsi que son incorporation dans un produit.

En ce qui concerne les remèdes judiciaires, la loi va bien au-delà des mesures accessibles antérieurement, puisqu’il est désormais possible d’obtenir :

– L’interdiction de l’utilisation ou de la divulgation du secret,
– L’interdiction de la production, offre, mise sur le marché, utilisation, importation, exportation ou stockage à ces fins de produits résultant de manière significative de l’atteinte au secret,
– Le rappel des circuits commerciaux, ainsi que leur modification pour supprimer l’atteinte, ou leur confiscation au profit de la partie lésée, ou encore leur destruction,
– La destruction des documents ou supports matériaux ou numériques contenant le secret.

En cas d’interdiction, la loi prévoit explicitement que la durée fixée doit être suffisante pour « éliminer tout avantage commercial ou économique que l’auteur de l’atteinte au secret aurait pu tirer de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation ».

On s’aperçoit donc que bien loin de se limiter à la simple réparation du préjudice, les textes cherchent désormais à remettre le détenteur légitime du secret dans son état d’origine, en « effaçant » les avantages indus tirés de la violation du secret par un tiers.

Cela étant, l’indemnisation du détenteur légitime n’est pas en reste : l’article L.152-6 calque désormais le calcul des dommages et intérêts sur les textes en matière de contrefaçon, à savoir que le juge doit désormais prendre en considération, distinctement, 1/ les conséquences économiques négatives de l’atteinte, dont le manque à gagner et la perte subie, y compris la perte de chance, 2/ le préjudice moral, et 3/ les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte, y compris les économies d’investissements.

A titre d’alternative, il est possible de demander une somme forfaitaire qui « tient compte » des droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le secret (sur ce point, le texte ne précise cependant pas que la somme doit être supérieure à ces droits, à l’inverse des textes sur la contrefaçon).

Quoique les travaux parlementaires précisent que cet article ne vise qu’à assurer la réparation intégrale (déjà garantie par le droit commun), il est clair qu’en fournissant une méthode de calcul plus précise que celle du droit commun, le législateur a cherché à améliorer le montant des dommages et intérêts prononcés par les juridictions françaises (comme cela était explicitement l’objectif pour la loi de 2008 en matière de contrefaçon).

On ajoutera que la loi prévoit aussi la possibilité de mesures de publication de la décision, comme en matière de contrefaçon (article L. 152-7), de telles mesures devant évidemment protéger le secret.

C’est donc un régime beaucoup plus protecteur du secret des affaires qui a été adopté par la loi n°2018-670 relative à la protection du secret des affaires.
Sans doute par crainte de voir le nombre de contentieux augmenter fortement, le législateur avait initialement prévu deux limites importantes en matière d’action en violation de secret.

Tout d’abord, cette action était soumise à un délai de prescription de 5 ans qui courait à compter de la commission des faits qui en sont la cause (article L.152-2). Un tel point de départ risquait de compliquer fortement la possibilité de poursuivre la violation « discrète » de secrets d’affaires, car si le détenteur du secret découvrait l’atteinte après cinq ans, l’action était prescrite.

Depuis, la loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprise (loi PACTE), la prescription a été alignée avec celle en matière de propriété industrielle, à savoir cinq ans à compter jour où le détenteur légitime du secret des affaires a connu ou aurait dû connaître le dernier fait qui en est la cause : ainsi désormais, à l’inverse, la prescription peut s’étendre sur une durée beaucoup plus importante que 5 ans, car le délai ne commence à courir qu’à compter de la connaissance de la violation du secret, et surtout de la dernière violation.

En outre, le législateur a explicitement prévu à l’article L. 152-8 qu’en cas d’action dilatoire ou abusive sur le fondement d’un secret, une amende civile d’un montant d’au maximum 20% des dommages et intérêts demandés pourra être prononcée contre le demandeur en justice. Quoique les amendes civiles soient en pratique très rares, il conviendra de prendre en compte ce risque avant d’engager une action.

III. PROTÉGER SES SECRETS D’AFFAIRES PENDANT LE PROCÈS

Les mesures préservant la confidentialité des secrets d’affaires communiqués au cours d’un procès

Il n’existait auparavant aucun dispositif permettant de garantir la confidentialité des informations communiquées au cours d’un litige, les juges recherchant le plus souvent un équilibre entre la préservation du caractère confidentiel d’un document et son utilité pour la résolution du litige. Désormais, de nouvelles prérogatives sont offertes au juge pour protéger les secrets des affaires devant les juridictions civiles ou commerciales tout en permettant d’obtenir la communication d’une pièce utile à la solution d’un litige. Ceci ouvre des perspectives aux acteurs économiques qui pouvaient jusqu’alors être réticents à engager une action au contentieux contre un tiers indélicat, de crainte de voir aggravée la divulgation de leurs secrets.

Ainsi, à l’occasion d’une instance civile ou commerciale ayant pour objet une mesure d’instruction sollicitée avant tout procès au fond ou à l’occasion d’une instance au fond, s’il est fait état d’une pièce ou si la communication ou la production d’une pièce est demandée, et s’il est allégué par une partie ou un tiers ou s’il a été jugé que cette pièce est de nature à porter atteinte à un secret des affaires, le juge peut mettre en œuvre certaines modalités destinées à aménager la communication ou la production de cette pièce. Dans cette circonstance, selon
l’article L.153-1 du Code de commerce, le juge peut :

– prendre connaissance seul de cette pièce, ou ordonner une expertise et solliciter l’avis des conseils des parties ;
– décider de limiter la communication ou la production de cette pièce sous forme de résumé (expurgé des informations couvertes par le secret des affaires) et/ou à restreindre l’accès à cette pièce à certaines personnes.
– décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée en chambre du conseil (c’est-à-dire en présence uniquement des parties concernées et de leurs conseils) ;
– adapter la motivation de sa décision et les modalités de la publication de celle-ci aux nécessités de la protection du secret des affaires.

En matière de propriété intellectuelle, les juridictions françaises ont eu l’occasion d’appliquer ces dispositions dans un litige concernant des brevets essentiels. Par ordonnances du conseiller de la mise en état les 9 octobre 2018 et 26 janvier 2019, les parties ont mis en place un dispositif de nature à assurer la protection du secret des affaires consistant notamment à (i) communiquer en accès restreint des contrats de licence, accessibles aux seuls conseils, à la cour et à des personnes ayant signé des engagements de confidentialité (interprètes,
experts économistes), et (ii) à soumettre à la cour deux versions de leurs conclusions écrites. L’une comportant des références aux contrats divulgués en intégralité en mettant en exergue les références aux informations confidentielles en vue d’attirer l’attention de la cour sur les passages à éviter dans sa décision, et l’autre version, expurgée de toute référence à une information confidentielle. Il a en outre été décidé que certains débats se dérouleraient en chambre du conseil afin d’éviter la divulgation d’informations confidentielles et que seules certaines personnes autorisées pourraient y assister (outre les parties, leurs conseils français et étrangers, les parties aux contrats divulgués, des experts et économistes).

Le décret n°2018-1126 du 11 décembre 2018 a complété plus en détail la procédure applicable aux demandes de communication ou de production de pièces. Il est ainsi prévu qu’à peine d’irrecevabilité, la partie ou le tiers à la procédure qui invoque le secret des affaires pour une pièce dont la communication ou production est demandée, remet au juge, dans un délai fixé
par lui, (i) la version confidentielle intégrale de cette pièce, (ii) une version non confidentielle ou un résumé et (iii) un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires(article R.153-3 du Code de commerce).

Afin de rendre sa décision, le juge peut entendre séparément le détenteur de la pièce, assisté ou représenté par toute personne habilitée, et la partie qui demande la communication ou la production de cette pièce (article R.153-3). Il statue sans audience sur le sort de cette pièce (article R. 153-4), et refuse sa communication ou production lorsqu’elle n’est pas nécessaire à la
solution du litige (article R. 153-5). En revanche, il ordonne sa communication ou production dans sa version intégrale lorsqu’elle est nécessaire à la solution du litige et alors même qu’elle est susceptible de porter atteinte à un secret des affaires. Dans ce cas, il limitera l’accès de celle-ci en désignant la ou les personnes pouvant avoir accès à la pièce dans sa version intégrale (article R.153-6). Il peut également ordonner la communication ou production de la pièce dans une version non confidentielle ou sous forme d’un résumé lorsque seuls certains éléments de la pièce sont de nature à porter atteinte à un secret des affaires sans être nécessaires à la solution du litige (article R.153-7).

La décision relative à la communication ou production de la pièce est susceptible de référé-rétractation, d’appel ou de déféré (selon les cas, articles R.153-8 et R153-9) dans un délai de 15 jours. Dans le cadre d’une instance au fond, si la partie ayant demandé la communication ou la production de la pièce voit sa demande rejetée, elle ne pourra faire appel de cette décision qu’avec la décision sur le fond (article R. 153-9 I).

Ces nouveaux mécanismes sont très utiles notamment pour rapporter la preuve de l’existence d’un contrat de licence dans le cadre d’un procès en contrefaçon (en présence de tiers à la licence). En effet la plupart des contrats de licence contiennent des clauses de confidentialité interdisant de les divulguer à des tiers, de telle sorte qu’une production en justice sans mesure de confidentialité ferait courir le risque de subir une action en responsabilité contractuelle, voire une résiliation de toute la licence. Les textes permettent désormais d’apporter la
preuve de leur existence tout en protégeant la confidentialité de tels contrats.

Gageons qu’ils seront aussi très utiles pour faciliter la démonstration du préjudice de la partie lésée, qui pourra désormais produire ses documents financiers en vue de démontrer sa marge pour justifier de son préjudice, en minimisant le danger de voir des informations aussi sensibles être utilisées par l’auteur du dommage…

Les mesures préservant la confidentialité des secrets d’affaires au cours d’une mesure probatoire

Un autre apport de la loi nouvelle (article R153-1 du Code de commerce et R.332-1, R.521-2, R.615-2, R.716-2 et R.722-2 du Code de la Propriété Intellectuelle) est la mise en place d’un séquestre provisoire que le juge peut ordonner pour préserver les secrets d’affaires, dans le cadre d’une mesure probatoire. En effet, pour prouver une contrefaçon, le titulaire du droit peut avoir recours à une mesure de saisie-contrefaçon ou solliciter une mesure d’instruction sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile.

Au lieu de laisser à l’appréciation de l’huissier, la mise sous séquestre des pièces pouvant constituer un secret des affaires, le nouveau texte permet au juge d’ordonner d’office le placement sous séquestre provisoire des pièces demandées. En pratique, les juges ordonnaient déjà cette mise sous scellé, lorsque des informations sensibles devaient être saisies.

La véritable nouveauté est que si le juge n’est pas saisi d’une demande de modification ou de rétractation de son ordonnance dans le délai d’un mois à compter de sa signification, le séquestre est levé et les pièces transmises au requérant. Cette mesure de séquestre provisoire pourra potentiellement permettre au requérant d’avoir rapidement accès aux informations saisies si le saisi n’introduit aucune action dans le délai d’un mois.

Néanmoins, à l’heure actuelle il est encore trop tôt pour savoir si les magistrats prévoiront systématiquement le séquestre provisoire des documents saisis dans leurs ordonnances sur requête 145 ou de saisie-contrefaçon.

Si vous souhaitez plus d’informations, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse: avocats@loyerabello.fr.


Auteurs :

Cécile CAUUET
Avocat au Barreau de PARIS
Directrice Département Contrats

Michel ABELLO
Associé fondateur et Managing Partner
Département Contentieux et Brevets

Stéphanie ROLLIN DE CHAMBONAS
Avocat à la Cour
Département Contentieux

Guillaume DUBOS
Avocat à la Cour
Département Contentieux

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